A la maternité, les papas ne font pas rien. La preuve en 5 points

3 heures du matin le jour J. Nous déposons Voilabébé chez des amis et fonçons à la maternité. 3 heures du matin, c’est frustrant. Personne sur la route. Les quatre itinéraires que j’avais ressassés afin d’éviter les voies embouteillées ne me sont d’aucune utilité. Je ne sers à rien. Chez les amis, Voilabébé refuse de dormir. On lui explique que maman s’est est allée à la maternité, qu’elle va travailler, pousser et mettre au monde un bébé. Voilabébé acquiesce et se contente de répondre par une question : « et papa, il fait quoi papa ? »

Question fatale, la seule qu’on n’ose jamais prononcer. Il a osé. Il fait quoi papa ? Euh, très franchement, il ne sert à rien, comme ses itinéraires bis.

Rien ?

Voyez plutôt ce que papa fait à la maternité et qu’il n’osera jamais vous dire :

1. La preuve que papa fait quelque chose

Papa n’ose pas poser de question à la sage-femme. Il voudrait bien lui demander ce qui signifie concrètement une échelle de douleur de 1 à 10 qui ne repose sur aucun critère précis. Jetant un œil vers maman en train de grimper à vitesse grand V sur ladite échelle, il renonce. Et se rabat sur une question plus consensuelle et demande s’il est normal que le sommet de la courbe des contractions sorte du graphe. En voilà une question intéressante. La réponse fuse : « tous les papas nous la posent cette question ». Si je fais comme tous les papas, c’est bien la preuve que je ne fais pas rien.

2. La preuve qu’être papa à la maternité, c’est exténuant

Papa retourne fréquemment à la voiture. C’est parfois justifié, parfois souvent non. Et à chaque fois, il doit se débarrasser de sa blouse et des sur-chaussures. Et les renfiler à son retour. Se changer quinze fois en l’espace de douze heures, c’est bien la preuve qu’être papa à la maternité, c’est exténuant.

3. La preuve que papa souffre aussi à la maternité

Disposant de 20 minutes à peine pour déjeuner, il attrape des contractions à l’estomac. A son retour, il entend dire à chaque couloir que les contractions, c’est terriblement douloureux. C’est bien la preuve que papa souffre aussi à la maternité.

4. La preuve que papa est utile au personnel médical

Papa remonte quinze fois de la voiture, nous en avons parlé. Chaque fois, il sonne à l’interphone : « c’est monsieur Voila, ma femme est en salle de pré-travail ». « C’est monsieur Voila, ma femme est en salle de travail ». « C’est monsieur Voila, ma femme est en salle d’accouchement ». La sage-femme peut ainsi suivre l’évolution de l’accouchement. Preuve que papa est utile au personnel médical.

5. La preuve que décidément papa ne fait pas rien

A force de ne rien faire, il prend le temps de réfléchir. Et tire des conclusions. Une surtout. Les femmes sont extraordinairement courageuses. Aujourd’hui, une surtout.

Ecrit en direct live depuis le petit banc d’une grande maternité lyonnaise. Le banc des papas.

Un premier jour sur la Terre

Nous nous y attendions. Neuf mois qu’il prenait de plus en plus de place dans le miroir. Son arrivée, nous nous y attendions et, pourtant, elle nous a surpris.

Comme la Lune autour de la Terre, la grossesse on tourne autour. Le soir, à la fenêtre, on jurerait voir un ou deux cratères sur la Lune mais on n’en est jamais vraiment certain. Toi et moi, c’était pareil. On se voyait mais pas très bien. Tu étais là dans notre ciel, je croyais distinguer tes mains, tes pieds mais je n’aurais pu en jurer. De face, c’était plein, rond. De profil, plutôt un croissant. Au début, une timidité certaine quand on s’adressait la parole à travers la paroi ventrale. Et puis, la parole s’est libérée. Un ventre entre nous, et alors ? On s’est habitué, et puis c’est le ventre de maman. On ne parlait pas non plus tout le temps. Neuf mois, c’est long, assez pour que la routine s’installe. Cette routine qui peut signifier que rien ne se passe alors qu’elle suggère surtout que tout va bien. On vivait ensemble, comme des colocataires. Tu avais tes occupations, j’avais les miennes. Et en prime, tu me laissais toutes les étagères du Frigidaire. Royal la coloc’. C’était notre petite vie, celle de tous les jours. A en oublier qu’un jour tu devais sortir. Et ce jour-là est arrivé. Quoique pas tout de suite. Chez les Voila, les grossesses sont longues, surtout vers la fin.

Le jour du terme, nous avons pris toutes nos précautions. Nous nous sommes dit que c’était le début de la fin, pas plus, pas moins. On ne nous y prendra pas deux fois. Nous avons bien fait. La fin a duré 6 jours (le septième jour, on se repose, c’est connu). Et là, surprise, la sortie est fulgurante. A peine évoque-t-on la tête que nous voyons les pieds : pas étonnant que n’ayons pas pensé à regarder le sexe. Tout s’enchaîne, tout surprend : tu ouvres les yeux, tu es « tout petit » dira Voilabébé1, tu es un garçon.

Naissance préparer la première sortie premier bonnet de bébé

 

Tu viens de la Lune et as posé les pieds sur la Terre. Bienvenue chez nous. Nous avons une place pour tes yaourts dans le Frigidaire. Seulement, les jours avancent et une chose ne nous surprend pas : nos nuits sont fatiguées. Sûrement parce que tu as un rythme venu d’ailleurs ? Le rythme de la Lune ? Réponds oui, toutes mes espérances résident là : le jour lunaire dure 14 jours et enchaîne avec une nuit de 14 jours. Et tu as 14 jours demain. Le moment de passer en mode nuit et commencer à dormir ?

Comment prendre bébé en photo La première photo de bébé

Sans rien dire

Je ne sais plus quoi dire.

La grossesse, c’était l’attente. On gravitait autour du principal intéressé sans jamais le voir. Que dire ? L’événement restait à venir, Voilabébé n’était pas tout à fait là, rien n’avait encore eu lieu. Et j’écrivais pourtant, beaucoup. Au rythme de trois articles par semaine. Alors que je pensais avoir si peu à dire…

Et Voilabébé est arrivé. Il s’en est passé des choses depuis la naissance. Je devrais avoir tout à dire. Je les vois bien ces petites anecdotes de la vie, celles qu’on dit. Voilabébé est léger mais nous fait crouler (et écrouler de rire) sous les mimiques. Celle du chef d’orchestre qui écarte les bras avec une autorité suprême et le regard inspiré, celle de la chasse à l’antilope quand, tourné sur le ventre, il guette, s’apprête à ramper mais, en vieux bonhomme, sait ne pas se faire repérer. Elles sont tellement présentes ces choses à dire que je ne sais plus où commencer (Ceci pour dire que j’ai mis du temps à revenir.. Un immense merci pour tous vos messages ! Vous m’avez manqué !)

Je ne sais pas les dire.

Une fois lavé et le cordon coupé, on l’a posé sur moi aussi sans rien dire. On a bien fait de ne rien me dire : je ne me suis rien dit non plus. « Tu te rends compte, tu es papa, pa-pa, non mais tu te rends compte ». Non, ce genre de phrases, on les répète avant, à l’époque de la grossesse. Pas pendant. Pendant, tu te fous de savoir ce que c’est un papa. Ce que ça implique, tu t’en moques. Ton enfant est né et va grandir. Et toi aussi : tu es un nouveau papa… et tu vas grandir. Alors tu ne te dis pas « oh là là, mais je ne sais rien faire. Que vais-je faire de toi ? ».

Non, tu fais. Sans rien dire.

Quand tu reçois un invité à la maison, tu ne sais peut-être rien faire, ni la cuisine ni le lit. Mais quand il arrive, ton invité, tu le reçois quand même. Tu lui serres la pince, tu lui adresses la parole, tu sais ouvrir la poignée de la porte de sa chambre.

Tu fais. Sans rien dire.

L’accueil de Voilabébé, c’est bien pareil. Avant la naissance, tu te sens désarmé face à l’immense tâche à venir. Et tout le monde t’énerve : « pff, mais ça vient tout seul, tu verras, c’est extraôôôrdinaire ».  Et le pire, c’est que c’est la vérité. Le jour de la naissance, tu ne demandes à personne comment porter ton enfant. Tu le portes. Tu demandes, en revanche, comment changer une couche. Mais c’est toi qui le changes. La nuit, tu ne te poses pas la question de savoir si tu es fatigué ou pas. Tu te lèves.

Sans rien dire, tu le fais.

Et Voilabébé est là, devant toi. Tu voudrais dévorer ses joues rebondies, accrocher ces grands yeux de ton regard, passer la journée à lui faire des papouilles dans le cou. Il est fort, Voilabébé.

Sans rien dire, il donne plein d’envies à Voilamaman et Voilapapa. Ca le fait.

La seule chose certaine…

La voisine : « la seule chose certaine, c’est qu’à notre retour de vacances, vous serez un de plus à la maison ».

La grand-mère du déjeuner du dimanche midi : « la seule chose certaine, c’est que dimanche prochain, il ou elle sera parmi nous ».

Le collègue-qui-sait-tout-sur-tout : « l’attente est longue, c’est sûr, mais une chose est certaine : dans une semaine, c’est plié ».

La voisine est rentrée de vacances, dimanche arrive et le jour du terme date presque d’une semaine. Une seule chose est certaine : Voilabébé n’est pas là.

Comme rien n’est certain – peut-être le principal enseignement de cette fin de grossesse -, je ne peux pas garantir à quoi ressemblera ma vie une fois Voilabébé arrivé. J’espère de tout coeur continuer à tenir ce blog. Je ne compte pas du tout l’arrêter ni même le mettre en stand-by mais le rythme de publications sera peut-être perturbé. Qui sait ?

Je ne m’attendais pas à ce que les rencontres – drôles, touchantes, profondes – faites à travers ce blog me procurent autant de joie. Je tiens à vous remercier de tout coeur, très chères lectrices et lecteurs, très chères commentatrices et commentateurs, pour ces beaux moments de partage.

La seule chose certaine (au cas où je ne pourrais revenir de sitôt), c’est que vous allez me manquer.

Après l’heure, c’est encore l’heure

Après l’heure, ce n’est plus l’heure. Sage adage populaire. Il permet de triompher de toute situation. Un entretien d’embauche prévu demain à 14h ? Portez le costume le plus strict, subissez des heures d’entraînement avec le père de votre meilleur ami, si vous n’êtes pas à l’heure, c’est peine perdue. Après l’heure, ce n’est plus l’heure.

La grossesse semble pourtant faire exception. L’heure du terme est fixée dès le troisième mois. Que le bébé arrive avant l’heure, il sera à l’avance et prendra simplement son temps à la sortie. Qu’il arrive à l’heure dite – le jour du terme -, il fera figure d’exception (l’accouchement n’est pas un entretien d’embauche, c’est confirmé) ! Seuls 4 % des naissances ont lieu le jour du terme. Qu’il arrive en retard, on l’accueille avec autant de plaisir… Alors, remise ton costume au placard Voilabébé, arrête l’entraînement… Et rejoins-nous !

Le jour du terme, le Jour J ?

Tout au long du huitième mois, on attend fébrilement le jour J, celui de la naissance. Les futurs parents sont à l’affût du moindre signe annonciateur de l’heureux événement, prêts à sauter dans la voiture en direction de la maternité. Les questions de l’entourage ou du voisin à la caisse du supermarché se font plus pressantes : « alors, c’est pour bientôt ? », « c’est la dernière ligne droite ? » Et les futurs parents d’apporter sempiternellement la même réponse : « oui, ça approche, c’est prévu pour le 13 août ». A force d’approcher, nous baissons la garde. Nous n’espérons plus fébrilement la naissance pour le jour suivant et nous contentons de nous répéter que, de toute façon, elle viendra bien un jour cette naissance.

Et le 13 août arrive et avec lui, aucun signe annonciateur mais des tonnes de messages d’une teneur nouvelle :  « si tu ne réponds pas, c’est que tu es en salle d’accouchement », « il va pointer le bout de son nez », etc. A attendre la naissance à tout moment, je ne me doute plus que pour l’entourage, le Jour J, c’est aujourd’hui. Bien loin de baisser sa garde, l’entourage a renforcé ses sentinelles et les a concentrées autour d’une seule date : le jour du terme. Nous n’entendons plus : « c’est pour bientôt » mais « c’est aujourd’hui ». A croire que le jour du terme, l’entourage nous précéde en salle d’accouchement…

La date du terme et la courbe de l’impatience

A 3 mois, le gynéco donne une date de terme. Il ne se prend pas pour Dieu le père, il se prend seulement à l’exercice des probabilités. Selon l’évolution du foetus au jour de l’échographie des trois mois, le jour le plus probable de naissance est le 13 août (dans notre cas). Et la courbe de Gauss de se mettre en place.

Au sommet de la courbe, le 13 août, les chances de naissance sont maximales. Plus on s’éloigne de cette fameuse date du terme, plus les chances de naissance s’amenuisent, tendent vers 0 % de probabilité.

Les dates entourant le 13 août – les 11, 12, 14 et 15 août – supportent encore des valeurs très élevées. Le bébé a certes moins de chances de naître le 11 août que le 13 août mais cela reste fortement probable. Et pourtant…. Comme nous sommes entrés dans le champ des probables depuis un certain temps (8 mois et 1 semaine, voire plus tôt), notre patience s’essouffle. A force d’espérer l’arrivée du bébé le lendemain, on la repousse dans son esprit à la semaine suivante. Bref, alors que les chance de naissance n’ont jamais été aussi fortes qu’à partir du 11 août, nous ne ressentons plus son arrivée comme aussi imminente que le 31 juillet ou le 3 août. L’impatience est une bien curieuse science mathématique…

8 mois et 1 semaine : l’illusion du sommet

Rien de plus technique que la préparation d’une course d’alpinisme. On veut gravir le Mont-Blanc, atteindre le sommet. Comme pour l’attente d’un enfant, la préparation logistique prend rapidement le pas sur toute autre considération. Il faut préparer les séjours dans les camps d’altitude successifs, ces paliers qui ponctuent l’ascension. Planter les tentes solidement, s’abriter du vent sans s’exposer au risque d’avalanche, installer un système d’éclairage rudimentaire, etc. Tout s’anticipe. La préparation de la vie en camp d’altitude occupe l’esprit, devient le principal sujet de préoccupation.

L’ascension débute demain. La première nuit au camp de base se déroule très bien. Le matin suivant, nous marchons vers le premier camp d’altitude. Le soir, l’installation des tentes me crispe mais tout se passe comme prévu. Le soir suivant, même chose. Jusqu’au camp d’altitude du dernier soir. Je me couche le sourire aux lèvres. Le lendemain matin, je me lève fourbu, harassé par la fatigue, assailli de lassitude. C’est le dernier camp, le dernier jour, mais pas le dernier pas. Le sommet est encore loin. Je doute de mes capacités à l’atteindre.

La grossesse, c’est la même chose : 8 mois et 1 semaine ou le dernier camp d’altitude, l’ultime marche à franchir. Et cette date est passée. Tout est prêt, sauf le bébé semble-t-il, ce qui décuple notre impatience. Nous ne sommes pas encore au sommet, seulement au dernier camp d’altitude. Je l’avais oublié.

Si les gens savaient

« Voilamaman n’est pas trop fatiguée ? Elle ne doit plus beaucoup se déplacer ». La question est maintes fois posée. Si les gens savaient.

Après avoir comptés sur un accouchement relativement précoce – au milieu du 8e mois -, nous distinguons de plus en plus nettement la date du terme se profiler. Elle arrive vers nous, mais pas à vive allure. Et Voilamaman de s’activer pour avancer l’échéance. Et Voilapapa, très officiellement en vacances, de suivre les travaux d’intérieur lancés par Voilamaman. Malheur (!), nous venons de déménager, les choses à réaliser dans la maison sont innombrables : accrocher une barre à rideaux, monter une table au dernier étage, descendre les cartons à la cave… « Voilamaman n’est pas trop fatiguée ? Elle ne doit plus beaucoup se déplacer ». Si les gens savaient…

La pizza de maternité

La salle de travail m’impressionne. Je m’attends à un temps d’ascèse parsemé de secousses ; un temps à attendre le bébé, ou les secousses justement, on ne sait plus. Un temps à ne rien faire, ni manger, ni boire, ni se divertir vraiment. Un article de magazine rapidement parcouru, voilà. Dans de telles conditions, je considère comme hautement stratégique le temps qui précède l’arrivée en salle de travail, ces quelques heures passées à la maison autour de la montée en puissance des contractions. J’appréhende une arrivée de Voilamaman en salle de travail en de mauvaises conditions. Et voici ce que je crains le plus et veux repousser absolument : la faim. Imaginer Voilamaman affamée alors que se profilent encore plusieurs heures de travail et l’effort de l’accouchement me paraît insoutenable.
Voilamaman doit manger quelque chose tant qu’elle est à la maison.

Tout à cette idée, je m’occupais du ravitaillement le week-en dernier en compagnie d’un ami espagnol venu nous rendre visite avec une amie belgo-portugaise. Dans chaque rayon, j’annonce : « ça, c’est pour la maternité » et dépose pizzas et plaques de chocolat dans le panier. Une fois rentrés à la maison, mon ami espagnol livre l’état de ses réflexions à Voilamaman : « en Espagne, à l’heure de se rendre à la maternité, le futur papa saute dans la voiture. Chez vous, il fait chauffer une pizza ».